Des corps suppliciés, des âmes meurtries, du matériel d’escalade dégradé… Le Flec était loin d’imaginer ce qui se tramait dans les locaux de la Cordée. Libérés, les ex-otages racontent leur calvaire.

Après plusieurs dizaines de minutes, une petite troupe de coworkers de l’ADM sort du 13, Cours de Verdun, suivie des ex-otages. Ces derniers arborent de grands sourires. Les empoignades sont émouvantes, les familles soulagées. On a du mal à imaginer le calvaire qu’ont pu endurer ceux que l’on appelle désormais « les encordés ». L’un d’eux, encore tremblant, raconte : « Je ne sais pas s’il existe un Dieu, une force quelconque, mais nos prières ont été entendues. Mes premiers mots vont tout d’abord aux coworkers de l’ADM, sans qui nous serions encore sous le joug de Couteau suisse. » A la simple évocation du bourreau, le jeune homme, visiblement encore sous le choc, s’effondre en larmes. Les ex-otages auront sans doute besoin de plusieurs mois avant de raconter ce qu’ils ont pu vivre, reclus dans ces quelques mètres carrés situés à un jet de pierre de la gare Perrache. Presque sous les yeux des passants s’est déroulé l’un des épisodes les plus barbares de ce début de XXIe siècle. Un encordé explique : « Le concept avait tout pour plaire. Partager des locaux pour rompre l’isolement lorsqu’on est travailleur en freelance, un rêve pour moi. Ce qui m’a fait pencher pour La Cordée, c’est ce concept autour de l’escalade, qui semblait intéressant au début. Une stratégie pour nous appâter, car tout est allé beaucoup trop loin…» Nous n’en saurons pas plus, la femme restera murée dans son silence.

Céline, meneuse du Front de libération des espaces de coworking (Flec), raconte les conditions de détention des ex-otages: « De mémoire de Flec, nous n’avions jamais vu ça. Ce qu’on a infligé à ces travailleurs indépendants, entre ces quatre murs, est inhumain. Visiblement, l’escalade est montée au cerveau du tortionnaire, qui a poussé le concept beaucoup trop loin. Certains étaient contraints de marcher nuit et jour en chaussures d’escalade. Je ne sais pas si vous pratiquez l’escalade, mais je n’ose imaginer la douleur qu’ils ont pu subir. D’autres se baladaient avec des mousquetons accrochés aux tétons. Sans oublier ceux qu’on a retrouvés ligotés, une boule de magnésie dans la bouche. »

< Lire le début de l’histoire “Epingle à cheveux contre Couteau suisse”

Lire la suite de l’histoire “Du Couteau suisse à la fourchette” >